Article évaluation entreprise - Revue de presse #22
La cession à bas prix est-elle nécessairement un acte anormal de gestion ?
Deux décisions récentes du Conseil d’Etat (CE 2 juillet 2025, n°497011) et de la Cour Administrative d’Appel de Lyon (CAA de Lyon 13 août 2025, n°24LY02635) confirment une jurisprudence déjà établie : la cession des titres à un niveau inférieur à leur valeur vénale n’est pas automatiquement un acte anormal de gestion dès lors qu’elle s’inscrit dans le cadre d’un engagement contractuel antérieur pris dans l’intérêt social.
En principe, lorsqu’une société cède un actif immobilisé à un prix significativement inférieur à sa valeur de marché, l’administration fiscale peut présumer l’existence d’un acte anormal de gestion, à moins que le contribuable n’apporte des éléments permettant de justifier cet écart. Cette présomption repose sur deux conditions : un appauvrissement de la société et une intention d’agir contre l’intérêt social de ladite société.
Cependant, les juridictions ont admis qu’un tel acte ne peut être qualifié d’anormal dès lors qu’il résulte d’un engagement antérieur, pris dans un contexte économique cohérent et dans la perspective d’un intérêt stratégique ou opérationnel pour la société. Ce peut être, par exemple, pour fidéliser un dirigeant clé, garantir la stabilité d’une structure, ou encore maintenir une activité commerciale dans un cadre contractuel établi.
Dans ces cas, le caractère minoré du prix est compensé par des contreparties économiques non immédiatement quantifiables, mais réelles : implication d’un repreneur dans le redressement d’une filiale, renforcement d’une politique d’enseigne, ou encore maintien d’une structure d’exploitation. L’existence de telles contreparties, prévues contractuellement, suffit à écarter la requalification fiscale.
Pour l’administration fiscale, il ne suffit donc plus d’identifier un écart de valeur. Une telle cession à un prix inférieur à la valeur vénale ne constitue pas nécessairement un acte anormal de gestion. L’existence d’un acte anormal est ainsi écartée dès lors que ce prix a été fixé dans un cadre contractuel antérieur pris dans l’intérêt des parties.
Sources :
« Cession à bas prix, engagement contractuel antérieur et acte anormal de gestion », La Revue Fiduciaire du 17 juillet 2025
« Engagement contractuel antérieur justifiant la faiblesse du prix : l'acte anormal écarté», La Revue Fiduciaire du 3 septembre 2025